ÉCRITURES > ANTI(GONE)



ANTI(GONE)

Pièce de théâtre
État : À disposition des compagnies de théâtre et éditeurs
Année : 2022
© Donatien Leroy

INTRODUCTION

Un road-trip à mobylette jusque l'île de Noirmoutier. Une fille qui trimballe les cendres de son père sur les routes. Le père qui réapparait d'entre les morts. Des règlements de comptes avant son grand saut. Et peut-être un peu d'amour entre les lignes...

Très très librement adapté de Oedipe à Colone de Sophocle






PREMIÈRE PAGE

Scène 1

La scène s’éclaire. La musique s’arrête progessivement.
Au premier plan, la fille est assise sur un trottoir ou sur un banc. Au second plan, se trouve la mobylette. À l’arrière-plan, le décor est projeté sur l’écran.
La fille porte une robe à motifs, des collants jaunes, des boots, un ruban rouge dans les cheveux. Un sac à dos plein à craquer se trouve à ses côtés.
Un tupperware de couleur vive est posé devant la fille, à ses pieds. La fille allume une cigarette. Elle regarde le tupperware avec insistance puis le saisit. Elle agite la boite devant son oreille. Elle fredonne « Oh ! Susanna », pendant ce temps, l’air détaché, insouciant.
Sur le couvercle du Tupperware, elle écrit « Papa », en gros, au feutre. Elle retourne la boîte (de façon à ce que le couvercle soit face au public) et écrit dessous : « 1970-2022 », tout en le prononçant lentement.

ANTIGONE
— 1970-2022.

Elle pose le tupperware par terre et le regarde. Elle se lève et jette sa cigarette. Elle sort un paquet de chamallow de son sac à dos et commence à en manger, tout en poussant le tupperware du pied. La fille aura souvent la fâcheuse tendance à parler la bouche pleine.

ANTIGONE
— Alors, papa chéri, le saloon est fermé ? C’est marrant comme tu causes moins, tiens. Tu trouvais toujours de quoi la ram’ner pourtant. Et alors, maint’nant, on fait quoi ?

Le père entre en scène, dans le dos de la fille. Il porte des lunettes noires, un costume sombre contrastant avec la tenue de la fille, un chapeau de cow-boy, un cure-dent dans la bouche, une canne blanche. Il est aveugle. Il s’approche de la fille.

LE PÈRE
— Tu causes tout’ seule, toi, maintenant ?

Antigone sursaute.

ANTIGONE
— Ah ! Putain !

LE PÈRE
— Quoi putain ?

ANTIGONE
— Mais t’es con ou quoi de m’faire flipper comme ça !

LE PÈRE
— Comment tu t’sens, ma grande ?

Elle lui fait front, le regarde fixement.

ANTIGONE
— Alors, toi, t’es mort, et faut encore que tu viennes m’emmerder avec tes questions ?

LE PÈRE
— J’peux quand même savoir comment va ma fille, non ?

ANTIGONE
— Parce que t’en avais quelque chose à foutre de ta fille toutes ces années ?

LE PÈRE
— Plus que tu ne crois, mon poussin.

ANTIGONE
— M’appelle pas, poussin.